jeudi 12 novembre 2009

Combien je regrette mon bras si dodu !

Pierre-Jean de Béranger, malgré un nom peu connu du grand public, est pourtant un chansonnier du XIXème des plus jouissifs.
Au-delà d'avoir suscité l'estime de pairs bien plus glorieux tels Sainte Beuve ou même Stendhal (qui allait jusqu'à le comparer à Goethe ou à Lamartine !...), ce garçon né dans une auberge parisienne ayant usé à moult reprises les bancs des gêoles françaises en raison de ses satires populaires a notamment écrit ce petit bijou d'impertinence intitulé : "Ma Grand Mère" :

"Ma grand-mère un soir à sa fête,
De vin pur ayant bu deux doigts,
Nous disait en branlant la tête :
Que d'amoureux j'eus autrefois !

Combien je regrette
Mon bras si dodu
Ma jambe bien faite
Et le temps perdu !

Maman, vous aviez le coeur tendre ?
- Oui, si tendre, qu'à dix-sept ans,
Lindor ne se fit pas attendre,
Et qu'il n'attendit pas longtemps.

Maman, Lindor savait-il donc plaire ?
- Oui, seul il me plut quatre mois ;
Mais bientôt j'estimai Valère,
Et fis deux heureux à la fois.

Quoi ! Maman, deux amants ensemble !
- Oui, mais chacun d'eux me trompa.
Plus fine alors qu'il ne vous semble,
J'épousai votre grand-papa.

Maman, lui fûtes-vous fidèle ?
- Oh ! sur cela je me tais bien,
A moins qu'à lui Dieu ne m'appelle,
Mon confesseur n'en saura rien.

Comme vous, maman, faut-il faire ?
- Eh ! mes petits enfants, pourquoi,
Quand j'ai fait comme ma grand-mère,
Ne feriez-vous pas comme moi ?

Combien je regrette
Mon bras si dodu
Ma jambe bien faite
et le temps perdu !"


Ma grand-mère, au grand dam de ma propre mère, dissimulait en permanence des bières alsaciennes dans le placard de sa chambre d'hopital qu'elle parvenait à se faire "livrer" par le personnel hospitalier lui-même, qu'elle attendrissait au moyen de charmes mystérieux...

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