lundi 2 juillet 2012

Heureux qui comme Ulysse...


Force est de reconnaître qu'il n'a pas été dans mes habitudes, depuis ce jour de septembre - il y a maintenant quelques années de cela- où j'ai décidé d'ouvrir puis de tenir ce blog, d'observer de si longue relâche. Plus d'un mois. Je ne peux donc me dédouaner si facilement, sans à minima prendre un cliché de la raison de cette incartade, question de probité personnelle dans la mesure où je n'ai ni cédé à une quelconque apathie, ni épuisé le filon qui m'a jusqu'ici amené à m'épancher régullièrement, mais sans espoir précis, dans un coin de la Vaste Toile. Dont acte. Ce qui est drôle, c'est qu'en même temps que je la soumets, je trouve à cette photo un réalisme particulièrement approprié, tant il apparaît qu'en voulant empiler ces volumes à côté de l'énorme chandelle que je me suis complu à faire systématiquement brûler au fil de leur lecture pour tenter de symboliser au mieux l'étendue herculéenne du voyage que je venais de faire, j'ai involontairement généré une allégorie picturale : je réalise seulement maintenant à quel point je me suis emmuré de ces blocs de pages pendant ces 37 jours, au détriment non seulement de ce blog, mais aussi de l'univers entier -enfin, celui qui m'entoure de façon sensible, tout au moins - : on dit communément d'un gros livre que c'est un "pavé", ici, il s'agit finalement clairement de briques, un peu disjointes, vaguement bancales mais lisses, étanches, anonymes, antipathiques, en tout point semblables, probablement, à ce qu'a dû être ma compagnie durant la lecture ininterrompue de ces 4.550 (et quelques) pages constituant les 13 volumes traduits à ce jour en français du "Games of Thrones" de George R.R Martin. Je dois maintenant aussi confesser que si la plupart du temps, lorsque l'on achève un ouvrage dont la suite n'est pas encore disponible, on se sent vaguement orphelin ou déprimé, je n'éprouve ici qu'une forme de soulagement. Le voyage n'est certes pas terminé, et je compte irrémédiablement réembarquer dès que possible dans le train de la suite de cette odyssée, mais cette étape imposée, cette pause pour cause de forfait momentané m'a soudainement procuré un apaisement réel, alors que je commençais à ressentir une sorte d'épuisement haletant à tournebouler dans cette spirale infernale de pages qui ne semblaient avoir de fin, attiré comme une phalène suicidaire par la lampe éblouissante tout autant qu'écoeurante non sans éprouver, sur la fin, quelques réticences à déglutir cette centaine de feuillets quotidiens à la saveur âcre. Ouf. Tout en feuilletant de grands volumes d'illustration et de dessins de haute volée pour ne plus laisser à mes yeux que le plaisir de l'image pendant quelques jours (détails et partages à paraître très prochainement dans un article de juillet !), je caresse maintenant de temps à autre avec tendresse la couverture placide du tout petit volume de Jim Dodge qui m'attend silencieusement à côté de mon clavier d'ordinateur, déjà rasséréné par la promesse d'un texte court... car merde, s'il me faut indubitablement revenir un peu davantage à une forme de vie sociale, renouer avec un peu d'oralité et de conversations, il ne s'agit pour autant d'envisager, ne serait-ce qu'un seul instant, d'arrêter de lire. Lire. What else ?

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