jeudi 4 août 2011

My own private Idaho (part 3)

Le temps reste désespérément maussade. Cette fois, on pousse jusqu’à la ville où se tient le marché. On déambule tous les trois sans grande motivation au milieu de la foule, un œil morne posé sur ces sempiternels étals de village tenus par ce mélange néo-babas / punks à chiens recyclés en pantalons africains assis devant des portes cochères devant des stands d’artisanat douteux, vieilles poétesses hippie aigries debout derrière des tréteaux couverts de produits bio mal étiquetés et d’extraits d’huiles improbables, et producteurs locaux moyennement aimables encerclés de cagettes de fruit ou réfugiés derrière des vitrines roulantes de charcuteries fromagères. On tourne en rond un long moment au milieu de troupeaux de touristes hagards, puis quand on a vraiment mal aux jambes, on s’engouffre dans une crêperie qui surplombe un pont de pierre, dans un quartier plus calme. On réalise être réellement abasourdis, comme si ce soudain afflux de bruits, de sons, de couleurs, d’odeurs et de promiscuités venait de dynamiter notre nouveau biorythme qui lui est lent, cotonneux et contemplatif. On ne se parle pas beaucoup pendant le repas et comme à l’accoutumée, c’est quand nous reprenons la route que le soleil fait son apparition en cinglant la nationale d’une chape aveuglante dégageant d’un coup un ciel céleste. Au rond-point d’un de ces villages fantômes recourbés sur la route comme un vieillard sur sa canne, je rate l’entrée d’une cave et après un chemin cahoteux que je prends à contresens, nous nous retrouvons dans le vaste hall d’accueil d’un viticulteur local, silencieux comme une église. Deux minutes plus tard nous goûtons des cépages de blanc de bourgogne dans de grands ballons ; il est trois heures passé et nous déclinons néanmoins systématiquement le crachoir, si bien que notre hôtesse réduira les doses des dégustation à chaque verre supplémentaire, ce qui nous fait rire. Nous remontons dans la voiture le palais chargé de mille vapeurs contradictoires après avoir calé deux cartons dans le coffre, et à nouveau, Lorie prend possession de notre habitacle.
Quand nous atteignons enfin la terrasse du bungalow, un petit cadavre d’oiseau raide trône devant la porte d’entrée. Après un rapide sentiment de dégoût suivi d’un stress bizarrement violent sur le moyen qu’il allait me falloir employer pour l’enlever, je me suis rappelé que nous étions en pleine montagne. J’ai regardé ma fille que la curiosité et l’innocence poussaient à étudier le petit corps rigide sans le moindre rejet, ai chassé l’image de pigeon mort qui me venait de la ville et sans parvenir à le toucher, j’ai récupéré l’oiseau dans une petite pelle en plastique. Nous avons traversé le champ de chardon qui borde la rivière jusqu’à un taillis, et je l’ai déposé là, couché sur le flanc. Nous avons répété une dizaine de fois « pauvre petit oiseau » puis nous sommes remontés au bungalow.

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