lundi 25 novembre 2019

Souliers vernis, pieds sucrés.

         
Le petit Jonathan reste assis derrière son papa et tape du pied avec ses frères et sœurs à chaque fois que passe un disque dans le salon, ce qui arrive souvent. Jonathan il aime le kung-Fu, et de façon générale, taper sur tout ce qui lui tombe sous la main, de façon spectaculaire de préférence.
                Bien que ce qu’il préfère, quand passent les albums de Stevie Wonder, de Billy Cobham ou de James Brown, ce sont ces lignes de basse machiavéliques qui lui font tout chaud au dedans, et qu’il singe en se déhanchant comme un beau diable, tout transporté d’infra-ondes au point d’avoir du mal à se retenir d’envoyer au passage quelques terribles high-kicks imaginaires à de grands méchants blancs moustachus, son papa, lui, voit en lui un potentiel drummer de légende : ce petit, il va vite et précis comme un moine Shaolin, et le groove coule dans ses veines comme le whisky dans celles de Robert Mitchum.

jeudi 21 novembre 2019

Vieux cons, petites putes (épisode 5)

- Je travaille pas avec Gilbert, je vous l’ai déjà dit. Ce type est cinglé.
Elle a fini par lui faire miroiter une somme rondelette, ce qui l’a fait hésiter une fraction de seconde. Cet appartement était étroit et surtout, moins bien exposé : le soleil n’y rentrait par aucune des fenêtres, quelle que soit la pièce. Rien à voir avec le triplex dont il venait de rendre les clés à contrecœur il y a une heure à peine à son retour d’Ardèche, et qu’il avait regretté sitôt franchie la porte de celui-ci. Tout en l’écoutant parler il balaya la cuisine du regard en grattant une poussière imaginaire du bout du doigt. Faut que j’y réfléchisse encore avança-t-il d’un ton maussade avant de raccrocher. Fallait qu’ils soient drôlement embêtés, à l’Agence. Le vieux ne leur réserverait pas de meilleur accueil.

mercredi 16 octobre 2019

(d)éditions : le catalogue



"S'il y a dialogue, le fait qu'ils soient ceux de l'Ego suggère que les interlocuteurs ne font qu'un. Les Egodialogues flirtent avec cette ambiguïté d'un autrui toujours là: l'autre voix de soi-même qui vous contredit. Les Egodialogues ne sont pourtant pas l'affrontement systématique de deux ego mais plutôt la tentative d'un discours qui tente de maîtriser les dérapages de son propre ego. La posture philosophique de cet essai pose de façon ironique l'existence d'un autrui auquel on se garde bien, ici, de laisser assez d'indépendance pour qu'il se détache de son propos et permette une dialectique qui soit autre chose que la pure opposition des opinions. 
Quid de la possibilité d'un discours qui puisse interroger la surdité, le silence des réponses en ce que, visiblement, elles s'empressent de toujours supplanter les questions. Ce qui semble fasciner l'auteur, c'est la possibilité même du questionnement : chaque question semble inutile, malséante, malvenue, blessante. C'est drôle, car le crétin a sans doute meilleur presse. Il en a toujours été ainsi : l'imbécile est une figure plus sympathique que celle du philosophe."

> SUIVRE LES LIBELLES : "Egodialogues" ici 
(Edition papier - 90 pages Editions Vanloo 2014 - (épuisé : derniers exemplaires disponibles en VPC sur demande en MP)



Un deuxième opus qui "investit à nouveau la figure de l'idiot en tant que celui qui fait rire car il questionne et que, par cet acte de faiblesse, il repasse par sa propre bêtise, qu'il l'affronte en s'en donnant le spectacle, quasiment en se détruisant en elle. La catastrophe de la bêtise entraîne la catastrophe de l'ego, passe par son propre chaos. C'est justement en cela qu'il est objet de fascination : si l'idiot offre tous les raffinements de la bêtise, ce 2ème volume ne joue plus au plus malin avec lui. Il se revendique ainsi du vide, se heurte au langage. Rien ne se déploie, on file vers l'aporie sans jamais l'atteindre, on tourne autour de la répétition, on n'ose pas, on se déchire.
Ainsi vont les Vacuodialogues dans leur drôlerie sarcastique : un désir ne parvenant jamais pas à se satisfaire. De lui-même il attend réponse, des autres aussi, de tous ceux qui peuvent incarner une figure. Pas de nom pour ouvrir la réplique, un tiret, puis un autre, et entre l'une et l'autre des répliques, le silence envahit tout, combat pathétique avec un punching ball qui refuse d'avoir mal."

> SUIVRE LES LIBELLES : "Vacuodialogues (Egodialogues Vol 2)" ici 
Exemplaire numérique sur simple demande en suivant ce lien



Imaginez un temps replié dans des profondeurs. Une civilisation sans horizon si ce n'est le bout d'un tunnel sombre. Enfilade de goulots et de cavernes où l'on vit le cœur cloîtré, où rien ne s'élève et où l'absence d'étoile rend encore plus concrète l'absence d'au-delà. Le monde reconstruit reproduit l'ancienne carte de la surface, invente de nouvelles luttes, se détruit sans autre projet, comme s'il y avait encore quelque chose à détruire. Le récit commence vingt ans avant avec les notes éparses d'Emmerick, le récit de son périple dans les souterrains : parti avec quelques centaines d'hommes pour conquérir de nouveaux tunnels, d'escarmouches en escarmouches, au terme du voyage ils ne sont plus que sept. Quand le roman commence enfin, les sept, dont trois sont devenus des notables, se sont divisés, trahis, désunis puis réunis. Dans un contexte politique trouble, Nadun, un fils au seuil de l'adolescence, représente soit l'espoir, soit le danger ultime, alors qu’au loin se profile un utopique et hypothétique retour à la surface. Ça peut sembler romantique. Héroïque. Tragique. Ça ne l'est pas. 

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Que se passe-t-il quand quatre assassins lambda, dans une réalité lambda, doivent finir, inévitablement, par se rencontrer au moment même où tout se vide de sens, jusqu'à la réalité de leur propre existence ?
Un récit déshumanisé dont on ne sait vraiment jamais s'il relève du rêve, de la fiction ou du réel, qui entremêle l'horreur à la banalité des jours qui se suivent dans une lenteur sensorielle sans plus de points de repères: rien ne fait plus valeur qu'une assiette sale ou un pot d'échappement. On suit le cauchemar vide de chacun des protagonistes comme un témoin englué, téléspectateur passif d'un programme nauséabond sans véritable contour, instinctivement curieux d'un dénouement dont il est pourtant clair, mot après mot, phrase après phrase, qu'il ne satisfera rien d'une attente elle-même indéfinie.
Une plongée opaque dans un océan hanté de sacs plastiques aux ondulations gracieuses singeant encore, pour un temps, ce qui faisait vie. Et pourtant, tous respirent.   

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jeudi 10 octobre 2019

Etre borgne ne fait pas de toi un cowboy (épisode 4)

Quand il est sorti des toilettes le ciel s’était terriblement obscurci, au point que la cuisine était plongée dans l’ombre. Une couche gris sale recouvrait les trois fenêtres rectangulaires, comme si une pluie de cendres s’était abattue sur la ville le temps qu’il pète bruyamment pour rien durant ce quart d’heure qu’il avait fallu pour qu’il comprenne qu’il ne sortirait rien de son cul – il n’avait mangé qu’un peu de riz et une ou deux bananes en trois jours, comment aurait-il été capable de produire quelque chose de valable. Il s’est resservi une grande tasse de café dont il n’avait pas envie, qu’il a accompagnée d’une cigarette en resserrant sa ceinture dans la salle de bain. A six heures et demie, un jeune soleil cinglait bêtement au-dessus des toits dans un concert de roses et d’oranges légers colorant l’indécision matinale du ciel. Il avait même esquissé une danse obscène sur l’air de samba qui passait à la radio et voilà que tout ressemblait à nouveau à une fin du monde, le jour pointant vraiment.

dimanche 7 juillet 2019

La grimace des vieux singes (épisode 3)

Bien que l’on soit dehors, l’air manquait. La soirée peinait à démarrer, elle s’était allongée à demi au centre de l’inconfortable canapé en rotin dont les coussins blancs avaient au moins l‘avantage de ne pas coller à la peau. En face, juché sur une chaise de jardin entre une quinquagénaire à robe fleurie trop exubérante et leur hôtesse qui sur-jouait l’enthousiasme, lui se servait généreusement à chaque retour du plateau sur lequel avaient été bizarrement agencées des lamelles de charcuterie en croûte pour composer une mosaïque porcine dans les tons rose-beige. Il avait opté pour ce pantalon ajusté de couleur criarde et souriait à l’aide d’yeux brillants et enfoncés. C’était assez crédible se dit-elle. Telle qu’elle s’était elle-même préparée, elle aurait pu avoir épousé ce genre de type et finir sa vie de cette façon, beaucoup trop maquillée chez des amis inutiles et ennuyeux, étalant la déroute de son corps dans un dernier baroud d’élégance vulgaire, engoncée dans ce Jean’s blanc, bardée de bijoux en or trop voyants.

vendredi 3 mai 2019

Les molosses sont des sales gosses (épisode 2)

Il avait un peu honte de s’y être pris à deux, c’était qu’un gosse après tout. Un gosse dans les cent kilos, mais tout de même. Il balaya le garage des yeux, c’était un sacré foutoir. Ils avaient salopé le travail, sans parler de la boue. Il le laissa parler durant tout le trajet, il semblait avoir besoin de ça et ça ne le gênait pas énormément, il n’écoutait pas de toutes façons. Des histoires d’expéditions nocturnes, de raclées fumeuses, fausses pour la plupart. Il connaissait mal la route, les virages étaient serrés et ses vieilles lunettes de vue étaient sales au point que certains reflets brouillaient les images qui surgissaient dans le faisceau des phares jaunes ancienne génération qui n’éclairaient guère plus d’une dizaine de mètres devant eux.
Tu l’as connu, toi, hein. Il ne savait pas trop de qui il voulait parler, c’était bien possible, des types dans les bars c’était pas ça qui manquait et les souvenirs qu’il avait gardé de son passage en prison n’étaient pas bien clairs.

mardi 30 avril 2019

Je sais que c'est pas vrai mais...

Il y a pile dix ans, au cœur d’un été caniculaire et à l’abri de la fraîcheur d’une vieille maison en pierre dans laquelle je passais des vacances dans le Sud-Ouest, je décide d’ouvrir un blog. Après quelques hésitations je le baptise « La Petite M », à la fois en référence au blues du post-orgasme (Ambroise Paré, posant les bases de la chirurgie moderne au milieu des champs de bataille, qualifie de « petite mort » les symptômes observés chez les grands blessés (frissons nerveux, étourdissement, syncope) avant que les Orientalistes ne détournent l’expression pour en désigner élégamment, et fort à propos, les sensations ressenties au moment de la jouissance sexuelle), et à la sensation d’être si petit et si peu remarqué (remarquable?) dans la grande et très ancienne ville dans laquelle j’ai vu le jour : Marseille.

Ce dixième anniversaire est pour moi l’occasion de sélectionner un peu arbitrairement un Post par an, parmi tous ceux qui ont fait le sel de ce foutoir numérique durant cette décade : en voici la liste (il suffit de cliquer sur l'année).

lundi 29 avril 2019

Le long ennui des assassins attendant d'être pris (épisode 1)

      
Ce dernier coup était inutile, la lame s’est enfoncée sans générer la moindre réaction mais elle frappa encore deux fois au même endroit, avec un peu moins de conviction peut-être. Le cœur n’y était plus. Elle dérapa en se relevant, manquant s’étaler dans la flaque qui gagnait du terrain.
- On aurait bien besoin d’une fille comme toi, à l’Agence.
L’idée de dizaines de types comme lui à l’intérieur du bâtiment de briques de l’autre côté de la route lui parut maussade. Elle avait envie de se laver les mains mais le lavabo étant situé dans l’autre pièce, elle s’essuya vaguement sur le devant de son t-shirt.
- Tu vas l’emmener où ? Elle n’était pas sûre d’être intéressée par la réponse. Le soleil entrait à grands flots à travers la vitre, tout étincelait, plus ou moins.

lundi 21 janvier 2019

La malédiction des figurines

Lorsqu’on a l’arrogance de naître à la même date et le même soir que son fils, le Bon Dieu s’agace. Il n’y a pas que lui : le chirurgien obstétricien doit s’échapper en urgence de chez sa belle-mère chez laquelle il commençait à s’en mettre une derrière la cravate, et ensuite, Papa, il avait pas prévu ce changement de timing intempestif, et merde, en plus, il voulait une fille qu’il aurait appelé Nadine. Du coup, le Bon Dieu commence par une petite balayette : il vous fera appeler Thierry grâce à Thierry Roland qui passe à la radio pendant que le break familial bombarde à travers la ville dans un décor de lampions, et fera même rajouter Noël juste derrière, parce que bon, non seulement niveau deuxième prénom, ceux des grand-père ont déjà tous été refilés aux frères précédents, et puis bon sang de merde, on n’a pas idée de se pointer en avance un de soir de noël et d’être un garçon quand on s’attendait à une garce, manquerait plus qu’il faille inventer un autre prénom un 25 décembre au matin, Noël non seulement c’est de circonstance, et puis y’a des tas de gens bien qui s’appellent Noël, tiens, disons… Noël Mamère.

mardi 15 janvier 2019

La valeur des choses, Mississipi John Hurt, Brian Eno et Nick Drake...

-         Heu… je sais pas. »
Il regarde quelque chose vers le bas, ses chaussures -d’hallucinantes baskets vertes montantes composées de boudins ventrus superposés-, à moins que ce ne soit les losanges difformes de mon carrelage. Vers le bas, et vers la droite. J’essaie de me rappeler ces trucs de psycho grâce auxquels on déduit, en fonction de la direction dans laquelle part le regard d’un interlocuteur, du caractère positif ou négatif de sa réponse, voire de son honnêteté. Mais je ne me rappelle rien de tout ça et ça m’énerve un peu. Peut-être que ce genre de trucs ne valent rien avec les rock stars. Avec eux, il doit falloir s’appuyer sur d’autres recettes qui collent davantage ; peut-être en lorgnant du côté de ces galeries d’archétypes du genre les Grands Fauves Décharnés d’un côté, les Harpies Peroxy-crêpées de l’autre…Golgoth Dandy ou Zèbre Aux Dents Blanches. Girafe Androgyne. Gnome Libidineux.

jeudi 10 janvier 2019

Copolymère isobutylène-isoprène (série 2)


Le gagnant

Hommage à Bansky / détail de la couverture de "Elections, piège à cons ?" Jean Salem - éd. Antidote/Flammarion

- Et bien voilà. C’est vous.
- Heu…
- Selon les dispositions légales, vous entrez en fonction dans sept jours.
- Le truc, c’est que j’avais pas spécialement demandé, moi…
- Ah mais personne ne demande rien Monsieur. C’est le principe. Ca peut tomber sur n’importe qui.
- Et si je refuse ?
- Disons que vous garderez le titre et la fonction, et que vous laisserez faire l’Assemblée. C’est arrivé, une fois. Un candidat avait décidé de ne rien faire. Ca n’a pas duré bien longtemps… Vous verrez, ce sera pareil pour vous. Au début tout le monde hésite, et puis ça vient très vite…
- C’est que ça fout un peu la trouille quand même…
- Je comprends. On serait impressionné à moins.

jeudi 3 janvier 2019

2019 : à défaut d'étrennes, prenez donc un filet garni

Vous faites partie des privilégiés ayant aimé les « Egodialogues »* ? 
Vous êtes encore – toujours ?- suffisamment oisif, déprimé et socialement stérile pour envisager de perdre encore un peu de ce temps qui ne vous servait déjà à rien il y a 4 ans, et dont vous n’avez pas fait grand-chose depuis ?
Alors tenez-vous bien : en envoyant un simple mail à vaccuopilot@gmail.com, recevez gratuitement, en retour de message**, le e-fascicule des « Vacuodialogues » pour replonger au cœur de 20 nouvelles conversations parfaitement inutiles, gratuitement méchantes et totalement dispensables, toutes saisies au vol par le petit bout de la lorgnette au dessus de la grande tragédie de la vie - voire dans un futur à peu près aussi ahuri.