vendredi 29 décembre 2017

Monsieur Pif

Le 1er décembre 1901, « l’Emancipatrice », une coopérative autogérée, décide d’offrir à Aristide et Célestine « Jean-Pierre », le premier journal illustré pour enfants d’inspiration socialiste : allez, ciao les curés et leur mainmise sur les parutions jeunesse, place aux contes, aux jeux, et à ce qu’on finira par appeler « bande dessinée ». Dedans c’est drôlement rigolo, même si des « reportages » tentent un peu d’influencer la sensibilité politique d’Aristide et Célestine : antiracisme, antimilitarisme, valorisation du travail manuel… Mais bon, faute d’abonnés, le trop précurseur « Jean-Pierre » s’arrête en 1904. Aristide et Célestine se re-cognent le bon goût catholique et retrouvent les gentilles illustrations crayonnées pastel qui plaisent tant à maman, soulignées de leurs légendes espiègles qui plaisent tant à papa…
La bataille politique du magazine jeunesse est pourtant lancée.

mardi 26 décembre 2017

Poquelin-terminable

- Demain on va au théâtre. Nous allons voir « Les Précieuses Ridicules ».
- Ah bon ?
- Oui. On avait déjà vu « Les Femmes Savantes » le mois dernier, on s’est régalés. Donc là, on profite !
- Diable…
- Quoi ?
- Bah c’est juste que moi, je me suis toujours emmerdé, au théâtre. Un peu comme à l’Opéra.
- Ha non, moi, j’adore ! Et l’Opéra aussi !
- Bon sang l’Opéra, à quelques rares exceptions près, je me demande comment on peut trouver du plaisir à subir ça pendant plus de deux heures : c’est d’un chiant !
- Ah mais non ! Vous ne pouvez pas dire ça ! C’est magnifique, au contraire : la grande musique jouée en direct, c’est impressionnant ! Et ces voix !...
- Ca je suis d’accord : c’est juste qu’au bout de vingt minutes, j’en peux plus. En fait c’est le côté « récit », je trouve ça épouvantable : ça me fait définitivement penser à une forme ancestrale de ces comédies musicales immondes dont ils inondent le marché à peu près tous les ans : aussi ridicule, mais version bourgeois.
- Mais enfin vous ne pouvez pas comparer ! L’Opéra, c’est la tragédie grecque, c’est l’épopée, c’est de l’Art ! On ne peut pas comparer Dove Attia à Tannhauser !

vendredi 22 décembre 2017

Basse(s) Fidélité(s) #10 : PeeksOfTheWeek

C'est parti pour une dernière série de clichés de mauvaise qualité de 2017 : cette ultime vague clôture 10 posts "basse fidélité"en illustrant, à la veille de fêtes plus que jamais marquées par une déferlante d'ultra-tehnologie, la philosophie du "Manifeste du Lo-Fi" avec une série dédiée aux numéros de voie : retrouvez votre âme d'enfant face aux chiffres, à leur graphie, à leur dessin, à leur matière, jouez ces chiffres au loto, changez votre propre plaque de façade, et surtout, à votre tour, surprenez vous à regarder les numéros qui trônent au-dessus des maisons et des immeubles qui vous entourent !
Aimez l'imparfait, regardez le monde, guettez l'âme des objets et des paysages et durant quelques minutes devant votre écran, avec La Petite M, accompagnez une forme de résistance à l'obsolescence à travers cette apologie des téléphones stupides -incassables, à grande durée de charge de batterie, et non intrusifs parce que non connectés -, la poésie de l'imparfait avec cette anti-illustration de la mode du "nous sommes tous de grands photographes", et l'ironie d'un monde où ce qui a été le "must de la technologie" d'un temps devient si vite ridicule...

"Les chiffres officiels sont loin du réel comme la terre l'est du ciel." (Y. Nemmar)

Croix de bois, croix de fer, derrière le n°8 se cache peut-être l'enfer...

vendredi 15 décembre 2017

Basse(s) Fidélité(s) # 9 - PeeksOf TheWeek

Chaque fin de semaine, découvrez les cheap belles images saisies à l'aide de mon Stoopidphone pendant que mon chien tire sur la laisse pour m'aider à les rendre moins nettes...
C'est parti pour cette semaine :
Tour effondrée du château de Protis / arbre sinistre

jeudi 14 décembre 2017

Dans les dents

Pendant de nombreuses années, la Science-fiction a été considérée comme un sous-genre littéraire vaguement rigolard destiné aux ados attardés et aux rêveurs boutonneux autrefois appelés « binoclards » avant que l’épithète « nerd » ne finisse par leur octroyer un caractère « loser mais sympa ». Mais toujours loser, attention. Aujourd’hui encore, même si le cinéma lui a fait gagner quelques lettres de noblesse (surtout eu égard aux recettes générées) à grands coups de Space Operas, de Disaster movies, d’Heroic Fantasy et d’adaptations Marvel, en littérature, on ne considère toujours pas d’un même niveau littéraire un roman de science-fiction et un roman « classique » : pour caricaturer, à quelques rares exceptions près - parmi lesquelles Jules Verne le précurseur, René Barjavel le poète ou Pierre Boule l’érudit - un Damasio ne vaudra jamais un Houellebecq, ni un Dantec un George Perec. Quelques écrivains-phare d’anticipation ou de science-fiction sont certes respectés, adulés même parfois, mais toujours marqués du sceau, aux yeux des « puristes », de leur double penchant pour à la fois une philosophie jugée de bas-étage et teintée de mauvais mysticisme, et des postulats scientifiques saugrenus et catastrophistes.
C’est très mal connaître le genre, mais ce n’est pas le but de ce post.
Le but de ce post, c’est de parler de Philip.

samedi 9 décembre 2017

Basse(s) Fidélité(s) # 8 - PeeksOfTheWeek

Chaque fin de semaine, découvrez les cheap belles images saisies à l'aide de mon Stoopidphone pendant que mon chien tire très fort sur la laisse pour les rendre plus nettes...
C'est parti pour cette semaine :

On dirait le Sud ?... (et c'est joli)

vendredi 1 décembre 2017

Basse(s) Fidélité(s) #7 - PeeksOfTheWeek

Les "Basse Fidélité" basculent en hebdomadaire ! Chaque fin de semaine, découvrez les cheap belles images saisies à l'aide de mon Stoopidphone...
C'est parti :
Boîte d’œuf terrorisante abattue par un caillou

Les yeux de la colline - sacs plastiques happés par les buissons 

mercredi 29 novembre 2017

La révolte


- C’est toute cette fatigue là, c’est terrible.
- Ah, toi aussi ?…
- Ca te tombe dessus comme une mauvaise couverture, un truc épais qui pèse… Non, en fait, c’est plutôt comme si on t’avait fait boire quelque chose sans que tu aies fait gaffe et quand tu t’en aperçois, du coup c’est trop tard : t’es tout vaseux.
- Fais gaffe, y’a peut-être un type qu’à mis du GHB dans ton verre !…
- Ouais, c’est exactement ça : je me sens comme une nana en fin de nuit qui devrait appeler un taxi vite fait si elle veut pas que ça tourne mal !…
- C’est que t’es plutôt sexy, mon cochon… Ceci dit, tout le monde à l’air dans le même état en ce moment. Ça en devient même bizarre. Y’a peut-être un truc dans l’air…
- C’est marrant les vieux ils disent tout le temps ça, « y’a un truc qui doit traîner dans l’air ». Ils disent ça pour tout, le rhume, la grippe, la gastro… Pour les gosses, aussi. Peut-être qu’en fait, y’a un virus de la fatigue ? On sait jamais, avec toutes les saloperies que les gens transportent sur eux à force de voyager à tort et à travers !

dimanche 26 novembre 2017

Basse(s) Fidélité(s) # 6

... ou le résumé du week-end en mauvaises jolies images :
Le Château d'Eau, ancienne pompe de Gratte-Semelle, vendredi en fin d'après-midi

Le tronc-aligator qui lézarde au soleil levant - Colline du Bois Sacré - Milieu de matinée 

mercredi 22 novembre 2017

Le hâle

- Une boule de feu ?
- Exactement.
- Ca paraît dingue…
- Toute lisse. Enorme…
- Enorme comment ?
- Je sais pas vraiment… Plusieurs fois la taille de la Terre en tout cas…
- Vous êtes sûr de ne pas exagérer un peu ?
- Non non, c’est une vraie merveille, une sorte de déflagration permanente, ça compense sans interruption un seuil d’explosion avec un point de réfraction : comme une lutte fratricide pour maintenir un point d’équilibre !… C’est l’arrière-petit-fils d’un astronome qui me l’a expliqué. Bref, c’est une étoile, quoi.
- Mince alors… Et vous dites que ça chauffe jusqu’ici ?
- Un peu que ça chauffe ! S’il n’y a pas de nuages, on le sent même dans le dos !
- … Je suis navré d’avoir à le dire, mais j’ai peine à vous croire…
- Oh, j’ai l’habitude. La plupart des gens réagissent comme vous.

Basse Fidélité # 5

Le Kraken végétal - Colline du Bois Sacré


> Retrouvez mon Manifeste de la Poétique de la Basse Fidélité, et toutes les captures de la série, en suivant le libellé : "Lo-Fi Pics"

mardi 21 novembre 2017

Golden Entourloupes

Dans Alban Di & Cie, 48 orpailleurs, mercenaires, aventurières, hors-la-loi, arnaqueurs, bonimenteurs et séductrices sont lancés sur les traces de la plus énorme pépite d’or jamais trouvée à l’Ouest.

L’une ou l’un d’eux la détient, soigneusement cachée dans ses jupes ou dans ses fontes : tous ensemble, ils forment un étrange cortège dangereux, poli, faussement cordial, qui traverse les plaines et les bourgades d’un FarWest imaginaire entre Nothing Gulch et les frasques de Blutch, au sein duquel tromperies, vols, stratégies et spoliations sont légion : si de fausses pierres y circulent sous le manteau, d’autres superbes gemmes servent aussi de monnaie d’échange entre ces aventuriers avides de lendemains qui chantent, dont la plupart sont des clins d’œil plus ou moins appuyés aux héros, mythes et légendes des Westerns de la MGM. 

Mais à l’instar des protagonistes d’« Highlander », il n’en restera qu’un qui franchira les doubles portes du Bureau de Change avec, dans la manche, la plus grosse pépite d’or jamais trouvée à l’Ouest.

Voici Karl Age, le lonesome Marshall destitué, aux traits découpés tout droit sortis d'un plan de The Magnificent Seven, quelque part entre Britt et Vince Tanner… (attention, copyright exclusif, tous droits de reproductions interdits)


Accueillez chez vous les 47 autres acolytes de ce Golden Rush familial : commandez Alban Di & Cie ici : http://jeux-oncle-barnabe.fr/alban-di-et-compagnie/

Basse Fidélité # 4

Le nuage rose. Lever de l'aube sur la rue Milly.

dimanche 19 novembre 2017

De l'électricité, et de l'Ecosse.

Dans le Guardian de 2015, Andrew Stafford, le Rock-érudit d’Australie, titrait à propos du départ officiel de Malcom Young du plus célèbre hard-blues band de tous les temps : « AC have lost their DC » avec, comme headline à un article particulièrement brillant[1] (traduction) : « C’était Malcom Young qui définissait le son d’AC/DC. Sans lui, les dieux du rock australiens sont menacés de ne plus être qu’un hommage permanent à leur ancien eux-mêmes. »

Basse Fidélité - #3

Minuit trente - Retour à la lumière - sortie de la colline du Bois Sacré


A l'aube - Vortex céleste au-dessus de la basilique


(Nous sommes fin 2017. Je possède un téléphone mobile idiot, équipé d’une fonction photo unique via un objectif exécrable que j’utilise depuis peu, le rendant plus idiot encore car ambitionnant, malgré sa qualité technique dépassée, de m’offrir une « option » qualitative : avec lui, j’ai décidé de constituer un témoignage éphémère de mes errances urbaines débarrassé de toute tentation esthétique autre que le sujet lui-même, et l’instant durant lequel je l’ai saisi.
J’enclenche cette fonction dans des conditions techniques ordinairement complexes afin de faire émerger le plus d’aléatoire possible, et donc une qualité d’image particulièrement médiocre, parce que je cherche à restituer l’état d’esprit qui génère ces clichés, tous pris à l’occasion de ballades avec mon chien : la notion de « fidélité » y cumule le rapport que j’ai avec mon animal avec cette idée simple que la fidélité de restitution du réel de ces instants en devient étonnante : brutes, floues, instantanées et sans destination, elles sont d'une grande poésie, pleines de bêtises et relativement inintéressantes.)


> Retrouvez mon Manifeste de la Poétique de la Basse Fidélité en suivant le libellé : "Lo-Fi Pics"

vendredi 17 novembre 2017

Basses Fidélités du 15/11/17

Matinée - Vents violent couvrant d'écume les îles du Frioul et du Château d'If - Esplanade de Notre Dame de la Garde


Cœur de la nuit - Les 3 scooters rouge - montée d'escaliers rue Villa-Paradis

(Nous sommes fin 2017. Je possède un téléphone mobile idiot, équipé d’une fonction photo unique via un objectif exécrable que j’utilise depuis peu, le rendant plus idiot encore car ambitionnant, malgré sa qualité technique dépassée, de m’offrir une « option » qualitative : avec lui, j’ai décidé de constituer un témoignage éphémère de mes errances urbaines débarrassé de toute tentation esthétique autre que le sujet lui-même, et l’instant durant lequel je l’ai saisi.

J’enclenche cette fonction dans des conditions techniques ordinairement complexes afin de faire émerger le plus d’aléatoire possible, et donc une qualité d’image particulièrement médiocre, parce que je cherche à restituer l’état d’esprit qui génère ces clichés, tous pris à l’occasion de ballades avec mon chien : la notion de « fidélité » y cumule le rapport que j’ai avec mon animal avec cette idée simple que la fidélité de restitution du réel de ces instants en devient étonnante : brutes, floues, instantanées et sans destination, elles sont d'une grande poésie, pleines de bêtises et relativement inintéressantes.)

> Retrouvez mon Manifeste de la Poétique de la Basse Fidélité en suivant le libellé : "Lo-Fi Pics"

jeudi 16 novembre 2017

Poétique basse fidélité (Manifeste)

A la fin des années 80, le lo-fi attaquait l’industrie discographique par le flanc en enfonçant avec une seule idée les rangs d’une course technologique compacte marchant bravement, au son des dollars, vers les lendemains qui chantent de notre époque : la qualité douteuse de l’enregistrement contribue davantage à l’impact artistique de l’œuvre.

lundi 13 novembre 2017

Autumn leave(s)

Hommage naturaliste au petit épagneul miraud et à moitié sourd des deux oreilles que j'ai extrait voilà deux mois d’une cage souillée de merde dans laquelle il a été fourgué cet été : nouvelle loi d’adoption oblige, il lui a fallu, pour avoir le droit à une vie meilleure chez nous, laisser ses bogues aux vestiaires. 
Putain il est dur, le parcours du chien de chasse nul à la chasse. 

Allez bienvenue Filou, petit couillon déchaîné débarrassé de tes couilles, incapable de voir ce chat de gouttière planqué deux mètres devant toi, mais qui marque quand même si consciencieusement l’arrêt, le trognon de queue raide comme la justice. 

Nous, à la chasse, on est nuls aussi : on tirerait pas une bartavelle à huit mètres… Alors tiens, on fera la chasse à rien, juste au bonheur de se geler les miennes, de couilles, pour le plaisir de te voir sourire la langue pendante après 40mn de course effrénée dans la colline de dessous la bonne Mère… 
(ou dans celle de la Citadelle de Forcalquier, où l’on trouve sur le sol d’épines de si belles bogues hérissées de piquants abritant leurs deux jolis marrons.)

« Dans un pays sans chien, on ferait aboyer le chat » (proverbe norvégien) 



jeudi 9 novembre 2017

Doug

Douglas Mac Arthur, général américain à la gueule d'acteur hollywoodien, a fait des choses dégueulasses et d'autres plutôt classieuses durant son interminable carrière militaire au long de laquelle il s'en est mangées, des guerres : révolution mexicaine, première guerre mondiale, Philippines, deuxième guerre mondiale, puis guerre de Corée. Bardé de médailles à chaque fois, à croire qu'en matière de pan-pan-pan, de bim-bim-bim et de viens-là-que-je-te-foute-un-pruneau-dans-le-buffet, il avait des capacités (de merde) qui l'ont d'ailleurs finalement conduit à diriger l'armée américaine toute entière, c'est dire si ça devait quand même être une belle sorte d'enflure. Je ne verse cependant pas assez ni en politique ni en militaireries pour me fendre d'une opinion à son sujet: ce qui m'intéresse, ce sont les quelques fulgurances qu'eut ce vieux décoré fumeur de pipe, tant, pour un bidasse, il sut

mercredi 18 octobre 2017

L'échelle de Jacob

A quelques rares exceptions près, la plupart d’entre nous avaient arrêté de travailler comme des bêtes de somme. Oh bien sûr on voyait encore rôder en ville de sacrées quantités d’ordures juchés sur ces scooters surpuissants en pantalons ajustés, comme à l’époque les roitelets sur leur palefroi (il est d’ailleurs intéressant d’observer ce « retour sur symbole » chez ce chanteur en vogue ayant décidé d’incruster dans son clip un plan le représentant sur le dos d’un grand étalon blanc sous le néon d’un parking souterrain, chaussé - comble du dandysme - de baskets à semelles lumineuses), aussi sûrs d’eux-mêmes que la suffisance pouvait le permettre. Des filles faisant claquer des escarpins bien trop couture pour leur permettre de marcher autrement qu’en imitant un de ces échassiers hantant les allées de parcs animaliers, un sac griffé aux allures d’outre en peau pendu au coude. Des quinquas ventripotents en chemise saumon, cheveux mi-longs et bas de jeans retournés, fumant négligemment debout devant des vitrines d’agences ; des femmes aux décolorations clonées de présentatrice TV garant en double file soit des SUV king size, soit des Fiat 500 Nouvelle Génération, devant des pâtisseries de luxe ou des enseignes de surgelés gastronomiques ; ces à-peine adultes aussi, cintrés dans des complets Zara grisâtres, les cheveux gominés, bardés de tablettes, de smartphones et d’oreillettes, zigzaguant entre les files au volant de ces épouvantables Smart. Des qui s’en foutaient pas mal que le monde s’écroule. Des tarés obnubilés incapables de lever le nez vers un nuage ou d’envisager dix jours de vacances ailleurs que sur une île post-coloniale hérissée de murs terracotta séparant leur plage privée de décharges à ciel ouvert ou de bidonvilles moyenâgeux. D’autres n’avaient tout simplement pas compris que tout avait commencé à se fissurer, et continuaient de marcher tête baissée vers le royaume des ombres entre deux consultations de compte bancaire sur internet. Mais globalement, de plus en plus d’entre nous laissaient tomber. Chaque jour, un nouveau décidait d’en finir, un soir, une fois débarrassé de ses godasses. Face à l’armée soigneusement rangée des supplices quotidiens, quand il ou elle pensait rentrer chez soi et pouvoir enfin se détendre : dans l’ordre, une maison un peu trop poussiéreuse, un lave-vaisselle à ranger à l’intérieur duquel au moins une assiette ou un bol allait déverser une flaque d’eau de rinçage sur ses chaussettes ou sur le carrelage qu’il faudrait éponger, un amas de linge sale dans la salle de bain ou une boule de draps froissés dans le tambour d’un sèche-linge, cette horripilante absence d’idée sur quoi faire à manger aboutissant à la nécessité de devoir repartir jusqu’à une supérette jonchée de produits infects allant invariablement faire se sentir coupable au moment de les réchauffer puis