vendredi 14 janvier 2011

Le cerf de l'autoroute d'Aubagne

L'entrée de l'autoroute reliant Marseille à Aubagne est un de ces entrelacs de passerelles herculéens où bitume et béton semblent s'être accouplés dans un ahurissant orgasme pour donner naissance à des excroissances lourdes et menaçantes aux courbes toujours plus offensives fendant les lois de la pesanteur, de la beauté et de la nature dans un ricanement de grisaille massivement indomptable.

Je traverse cette perspective cauchemardesque au volant de mon véhicule carossé et rutilant, m'engouffrant à grande vitesse sous des ponts inutiles, épousant les lacets distendus de virages gris-noirs au milieu d'un flot de métal quand, surgissant sur ma droite comme un étrange mât planté au milieu d'un champ, ce panneau.
Je jette un oeil à droite sur les fumerolles glaireuses s'échappant à grand'peine d'une usine de périphérie, puis à gauche, sur cette vieille barre d'immeubles agonisants dans les échappements brûlés.
Je me demande à quand remonte la dernière fois ou un tel cerf, aussi beau, aussi pur et puissant, les muscles pareillement bandés dans ce saut d'une grâce saisissante, a surgi comme d'un rêve au milieu de cette langue plate et nauséabonde.
Je me demande la tête du type qui a sû convaincre d'autres types de l'utilité de mettre ce panneau à cet endroit là, précisément.
Puis j'accélère.
Je roule, et je guette le cerf.
Le cerf de l'autoroute d'Aubagne.

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